Depuis la plus haute antiquité, le pochoir a été un moyen technique, un outil de représentation graphique et symbolique : les mains apposées sur les parois des cavernes à Gargas ou en Patagonie, soulignés par des pigments soufflés sont les ancêtres des graffitis qui hantent Paris à la fin du XX° siècle.
Bien avant Blek, Miss Tic et autres anonymes de la nuit, le pochoir a eu des applications militaires (caisses à munitions...) utilitaires (Haut et Bas) ou décoratives. On pense par exemple aux splendides frises que peignaient les peintres italiens 'a fresco" sous les corniches niçoises.
C'est avec les slogans politiques que le pochoir s'est approché de sa forme actuelle. Les affiches se déchirant, l'imprimerie étant chère, les affichages politiques des petits partis se font au moyen de pochoirs : distribués dans des revues ou des réunions de militants, ces pochoirs "à découper" ont permis à des images ou des slogans de s'afficher sauvagement et clandestinement... Mai 68 a été l'année du pochoir slogan et des phrases massues.
On pense aux slogans politiques en Amérique latine, au Chili pendant les années Allende.
Plus proches de nous, et beaucoup moins politiques, les lapins, cloches et oeufs de paques, pères noels joufflus et autres rennes bombés en fausse neige et qui fleurissent sur les vitrines des jours de fête.
Si on résume les caractéristiques qu'offre le pochoir : rapidité d'exécution, reproduction fidèle d'un modèle prédécoupé, possibilité de varier la couleur (ou les combinaisons de couleur), maniabilité de la grille et capacité à être décliné sur des supports variables, on voit qu'il s'agit d'un vecteur irremplaçable pour un message visuel ou écrit, chargé de symboliques et à portée de tous.
En fait, dans le pochoir, l'expression artistique se situe à deux niveaux : dans la conception et la découpe de la grille, qui fait appel à des qualités de dessin, des techniques de découpe et de précision et dans le passage à l'acte sur le mur.
La première partie s'apparente au travail du photographe. Il faut concevoir une image en "valeur" et transformer les ombres en vides par où passera la peinture.
Le passage au "mur" et à la peinture demande un "coup d'oeil", de l'audace, de la vitesse, de la créativité pour décliner les couleurs, composer un motif, inclure son image dans un cadre et jouer avec les formes, les couleurs, le grain du mur et du support.
Chateaubriand (Chatenay 1990) ... Un clin d'oeil complice entre deux pochoiristes qui se répondent sans se connaître.
Miss Tic disait de ses poèmes qu'elle bombe inlassablement sur les murs, que sa "poésie est une poésie vraiment engagée". Pour être engagé, on est vraiment engagé.... Quel pochoiriste n'a pas eu maille à partir avec la police? Bombes confisquées, fouille au corps, grilles déchirés et nuits au commissariat?
Il faut vraiment avoir quelque chose à dire ou à exprimer pour reprendre le chemin de la rue avec ses bombes et ses cartons!
Et pourtant, malgré le risque (ou peut être par goût du risque), on y retourne, encore et encore!
Une histoire drôle en pochoirs : Sur les murs du réservoir Montsouris, au coin de la rue des Artistes (8) (14°)....
Un coureur affamé course mon autruche... Et bien, puisque c'est comme ça,
Attention, je lâche les springbocks..
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